L’amour qui fait bouger le soleil et les autres étoiles.
C’est avec ce vers que Dante termine la Divine Comédie, fermant le rideau sur le long voyage qui a commencé en enfer et s’est terminé, en fait, au chant XXXIII du Paradis.
Qui sait si le Suprême, contemplant l’Empyrée avec Béatrice, ne se sera jamais demandé par quel amour divin ont bougé ces cieux et ces planètes qui y sont suspendus, reposant fermement sur la structure géocentrique heureusement enfantée par Ptolémée : et Aristote.
Quelques siècles plus tard, Copernic et Galilée nous apprendront que la Terre n’est rien de plus qu’une planète périphérique faisant partie d’un ordre cosmique plus vaste, dans lequel le Soleil occupe l’un des deux foyers des ellipses orbitales produites par les planètes en rotation autour de lui.
Mais qu’est-ce qui cause, qu’est-ce qui conditionne cette réciprocité de mouvements entre les corps célestes ?
On sait aujourd’hui avec certitude que les ondes gravitationnelles sont les responsables, les principaux suspects, de cette errance mutuelle.
Mais le chemin pour arriver à ces conclusions, qu’Einstein a introduit dans la première moitié du XXème siècle, a été tout sauf facile et sans obstacles.
Prenez un peu de recul dans l’histoire et essayez de comprendre comment ce chemin a évolué et quels tournants conceptuels fondamentaux ont souffert au cours de ce parcours progressif.
Déjà dans la Grèce antique, on peut voir des traces claires des premières tentatives de description du phénomène : Certainement contextuel à une vision animiste de la création et de la nature, synthèse parfaite d’une construction anthropologique dans l’être, Empédocle fait allusion à l’origine des forces agissantes et agrégantes ; l’amour et la haine, dans leur réciprocité d’action, détermineraient l’activation de la motilité des forces visibles.
Anaxagore, autre penseur sublime, se détache de la ligne bipolaire empédocléenne, pour se consacrer à une conception plus métaphysique et transcendantale : Esprit suprême comme activateur de l’action en devenir.
Selon Platon, la matière en général, donc aussi les planètes en conséquence, serait imprégnée d’une sorte d’énergie intimement intrinsèque, par laquelle s’exercerait l’attraction du semblable vers le semblable ; réflexion dont ne se détache pas beaucoup l’amer élève-rival Aristote, pour qui la création tendrait, selon un désir implicite dans la nature elle-même, à la perfection du premier principe.
La tension vers cette recherche de la perfection, et donc les forces qui en résulteraient en tant que vecteurs et expressions, s’exprimeraient à travers le mouvement des sphères célestes, depuis une condition initiale d’hypothétique perfection circulaire jusqu’à une corruption finale vers le mouvement rectiligne.
La théologie chrétienne, qui pourra reprendre la doctrine néoplatonicienne, placera dans le logos divin la cause de l’attraction vers lui des étoiles et des planètes, puis de leurs mouvements, et cela juste dans cette parenthèse médiévale où l’ordre supérieur peut être représenté selon des hiérarchies angéliques précises et ordonnées.
Que sont les ondes gravitationnelles ?
C’est à partir des XVIe et XVIIe siècles que les choses commencent vraiment à changer : C’est précisément dans ce cadre historique précis que les produits de la pensée se contextualisent dans une nouvelle conjugaison, exprimée dans le symbolique, mais pas pour autant dépourvue de concret, passage de la vision animiste de la création évoquée plus haut à une conception mécaniste plus pragmatique.
Galilée fournit sa propre explication des forces du visible, donnant à ce cadre théorique de fortes connotations de nature quantitative : Notamment en référence à la force de gravité terrestre.
Descartes se joint au chœur, précisant toutefois que, selon lui, la gravité devait nécessairement consister en un modèle intrinsèque, ramenant ainsi dans la direction des préceptes platoniciens précités : Force intrinsèque qui s’insère toutefois dans le contexte de l’éther et de l’impérative conservation du mouvement.
D’une opinion entièrement différente était Leibniz, qui a contesté à Descartes l’impossibilité de décrire l’essence d’une force, en se concentrant simplement, précisément, sur la loi de conservation du mouvement constant à résultante nulle des forces externes.proche de Descartes était Newton, qui a conféré à la masse une valeur fondamentale dans l’architecture de son élaboration sur la mécanique gravitationnelle.
La pomme tombée sur sa tête, outre sa valeur poétique et figurative évocatrice et prosaïque, assume une valeur concrète : la force qui a produit la chute de la pomme est la même qui influence et coordonne le mouvement des planètes autour du Soleil et les maintient liées à lui.
Même si on dispose de modèles descriptifs du comment, capables à leur tour de formuler des modèles prédictifs, il manquait encore un modèle capable de décrire le quoi.
C’est Einstein lui-même, au début du vingtième siècle, qui a apporté une contribution précieuse en ce sens.
Selon le physicien allemand, l’onde gravitationnelle serait une déformation du tissu spatio-temporel de l’univers : La présence d’une masse, en substance, produirait une courbure dans ce tissu, le déformant et le déformant.
Pensez à une orange placée au centre d’une nappe, maintenue en tension : Si on pensait quitter la nappe, on verrait instantanément le tissu se froisser vers le centre, juste là où se trouve l’orange, ondulant comme une sorte d’entonnoir.
Exemple peut-être trivial mais certainement efficace pour tenter de mieux décrire le concept sous-jacent à l’exemple lui-même : La gravité est produite par la masse, qui déforme et déforme le tissu spatio-temporel.
Les ondes gravitationnelles peuvent donc être considérées de la même manière que le rayonnement gravitationnel.
En substance l’onde gravitationnelle comme produit de la gravité, comme produit de la masse : Ergo, onde gravitationnelle, pour la propriété transitive, produit de la masse.
C’est prosaïque de penser à la pierre classique jetée dans l’étang, en l’observant pendant qu’elle produit des ondes concentriques qui partent du centre et se propagent vers l’extérieur, comme l’ancienne Atlantide.
Qui sait si le mythe platonicien atlante, un jour à venir, sera consciemment relié à la gravité : Cela paraîtra étrange, peut-être seulement une coïncidence, mais la légende veut que justement cette ancienne proto-culture avancée ait été dépositaire d’une technologie très avancée et d’un savoir très sophistiqué. Tellement futuriste qu’il serait capable, grâce à des talents inconnus de nous, d’annuler la force de gravité elle-même.
Qui sait ? Comme le dirait Hans Landa dans le film Inglourious Basterds : Les faits peuvent être trompeurs, les rumeurs, vraies ou fausses, sont souvent révélatrices.